La voix insurgée de Déwé Gorodé - La voz insurgente de Déwé Gorodé

 « Nous essaierons de

Recoller les brisures des espérances anéanties

Regrouper les images du discours étranglé

Retrouver l’unité de la parole éparpillée

Aux quatre vents de la solitude [. . .]

Recréer la phrase rituelle qui démasque la traîtrise

Réinventer la danse magique qui assure la victoire »

 

Un peu d’histoire

La Nouvelle Calédonie fut principalement colonisée par des bagnards dont des Communards ayant échappé à la peine de mort, parmi lesquels se trouvait Louise Michel.

Une fois leur peine accomplie, la plupart d’entre eux n’avaient pas le droit de retourner en Métropole, ce qui permit de peupler le territoire de colons d’origine européenne. Ce qui entraîna, bien entendu, une spoliation foncière qui fit éclater une révolte kanake, en 1878, les Kanaks étant les habitants originaires de l’archipel.

Le colonisateur français isola les Kanaks et fit venir, comme main-d’œuvre, des natifs de l’Asie du Sud-Est.

Cette situation persista jusqu’à la seconde Guerre mondiale. Après 1946, le Code de l’indigénat fut aboli et tous les habitants devinrent français, supposément, à part entière.

Se forma alors, au début des années 50, l’Union calédonienne qui remporta élection après élection. À l’instar de l’OAS, en Algérie, les tenant de la République coloniale, eurent recours à l’illégalité des attentats et des meurtres.

Dans les années 60. Alors que la Polynésie devient le centre de l’expérimentation nucléaire de la France, le gouvernement revient à la tradition autoritaire en Nouvelle Calédonie. Les Kanaks redeviennent les laisses ´pir compte de leur pays. En 1985, 8% d’entre eux obtiennent le baccalauréat.

Or, déjà dans les années 60, et s’inspirant des luttes du tiers monde, les bacheliers kanaks dénoncent la marginalisation et le racisme qui frappe leur peuple.

Le gouvernement répond en installant en Nouvelle Calédonie, des Français en provenance des anciennes colonies d’Afrique du Nord.

Les années 80 sont, dans l’archipel. La scène de ce que l’hypocrisie langagière française appelle, comme elle le fit pour la guerre d’Algérie, les événements, concrètement une guerre civile qui opposa les kanaks aux tenants de l’appartenance à la République française que l’on nomme caldoches.

Les accords de Matignon, signés le 28 juin 1988, mettent fin aux hostilités mais les deux signataires du côté kanak, Jean-Marie Djibaoui et Yéwéné Yéwéné, sont assassinés, le 4 mai 1989, par un indépendantiste irréductible.

 

C’est dans cette terre en conflit que naît, en 1949, Déwé Gorodé.

Après ses études secondaires dans son pays natal, elle obtient, en 1973, une licence en lettres modernes à l’université de Montpellier.  Elle y découvre aussi les écrivains de la Négritude, ce qui déclenche en elle une prise de conscience aussi bien artistique que politique.

L’autrice est incarcérée en 1973 ainsi qu’en 1977 à cause de son engagement dans le mouvement indépendantiste kanak.

Voici ce qu’écrivait Déwé Görödé dans ces années montpelliéraines :

Nuits nues

à toi, ma sœur kanake

 

                              Nuits nues

                              Ombres sans lune

                              Seul l’aveugle à vie

                              vit avec ta peau

                              belle

                              femme qui attend

                              dans les nuits nues

 

Tu es la iule (1) errante au bord des sources le long des rivières et des ruisseaux

tu t’enroules dans ta chevelure qui te recouvre toute

Puis à la venue du guerrier qui poursuit la fille enfuie de la Tribu

tu te dénudes tu te découvres tu t’ouvres

Et l’âme du fils de la tribu

pénètre dans ta chevelure et s’y perd

L’âme du fils de la tribu l’esprit du guerrier

sont devenus la case où vit la iule errante

 

 Tu es la fleur sans cesse effeuillée par les souffles du récif le dieu cyclone

tu te laisses cueillir au gré des nuits interminables

par les mains les doigts qui manient les sagaies les haches ostensoirs et les

casse-têtes

tu t’abandonnes tu te fanes tu revis

et tes mains du tayo (2) se lassent

et les armes du tayo reposent en paix

les haches les sagaies les casse-têtes se sont endormis

et sont sages totems de tes pétales immortels

 

Tu es la pluie limpide qui hante la haute montagne gardienne des esprits tabous

 

 L’appel anxieux du sorcier faiseur de pluie te tente

Devenue multitude pour lui tu quittes les nues

dans la noire folie des eaux

Et la danse du sorcier t’accueille

et les voies rituelles cette nuit se taisent

La rivière de la vallée vous a engloutis

et les paroles du sorcier deviennent gouttes de pluie

 

                             Yeux clos

                              Larmes de joie

                              A l’aube la rosée

                              jaillit de tes seins

                              sources

                              eaux qui divaguent

                              dans tes yeux clos

 

(Montpellier, 14 janvier 1972)

 

(1) iule : sorte de chenille, assimilée à une nymphe des sources et des bois. Totem de certains clans, elle est réputée pour égarer ou rendre fous les passants.

(2) tayo : homme kanak

Le premier recueil de poèmes de Déwé Gorodé, Sous les cendres des conques, commencé en prison, paraît en 1985 aux éditions Edipop. Nous y trouvons l’un de ses textes les plus connus :

Araucaria

Araucaria

pin colonnaire

qui troue le ciel de mon pays

de son tronc s'étirant

vers les souvenirs inavoués

de mon peuple humilié

réfugié dans le ciel des prières


pour oublier


Araucaria

arbre à palabres

de clans et tribus trahis

sur cette terre qui est leur

leurs paroles figées

dans ta dure résine solide

je les dirai en face car je ne veux

 

PAS OUBLIER

 

Je les écrirai

là où je le pourrai

du mieux que je le pourrai

ici et maintenant car

 

j'ai beau chercher

la nuit le jour

je ne vois rien d'autre dans le ciel que

pour éclairer ma mémoire

En 1994, l’écrivaine publie Utê Mûrûnû, petite fleur de cocotier, un recieol de nouvelles qui sera réédité vingt ans plus tard avec deux autres textes dont Utê Mûrûnû 2014 qui évoque , à travers plusieurs générations, la condition de la femme kanak, tiraillée entre le respect de sa culture millénaire et l'appel d'une société en mouvement.

« Utê Mûrûnû, mais laquelle d'entre nous toutes finalement ? Bonne question ! Car aujourd'hui nous sommes très nombreuses, nous qui portons ces deux prénoms hérités de nos grands-mères des générations précédentes. Ici même dans notre tribu, voire à travers le pays, selon les réseaux de parenté qui fondent et qui régissent la formation sociale kanak. Toujours est-il que moi, UM 2014, qui ai vingt ans cette année, je suis cette petite fille dont ma grand-mère éponyme avait rêvé lorsque j'étais encore dans le ventre de ma mère. Je suis absolument sûre de cela puisque, au fur et à mesure que je grandissais auprès d'elle, dans les années de ma prime enfance, elle me répétait sans cesse que j'étais le portrait craché de la petite fille de son rêve. »

En 2005, Déwé Gorodé publie, aux éditions Madrépores, son premier roman, L’épave.

Aux abords de Nouméa, à l’abri d’une vieille barque retournée sur la plage, Tom et Léna, vont apprendre à s’aimer...

Au gré des rencontres, au fil des souvenirs qui s’égrènent, et parfois les rongent, ils tentent en vain de démêler l’écheveau des désirs, des peurs et des doutes qui pèsent sur leurs jeunes vies.

« […] après, quand le front a décidé la mise en place à la base des structures politiques, économiques et scolaires à la rentrée, là où c'était possible, avec mon copain, on a rejoint d'autres jeunes dans sa tribu au fond de la vallée pour animer l'EPK, l'école populaire kanak. Auu, ma sœur, l'EPK, j'ai aimé ! Qu'est-ce que j'ai aimé cette école-là ! Cette école de ce temps-là. Le temps des luttes. Cette école qui n'avait rien à voir avec celle que je venais de laisser tomber derrière moi. Cette école qui m'a ouvert les yeux sur mon identité. Sur d'où je viens, qui je suis, où je vais. Cette école où j'ai appris à être debout. Et à être avec les autres. L'école de mes rêves ! »

« Car, je vais te dire, moi, la seule chose qui intéresse ces beaux messieurs, c’est notre nickel, point barre. Plus, évidemment, leurs commerces, magasins, et tout le bazar, hein ! Et là-dessus, tu peux y aller, ils sont tous pareils, les mecs, quand il s’agit de leurs gros sous et autres gros trafics ! Parce que le Caillou, comme ils disent, c’est juteux, c’est très juteux même ! À quel point ! On n’a même pas idée tellement qu’on nous a toujours virés de la cour des grands ! Ouais, c’est toujours le gros bizness avec des sacrés profits pour leurs grosses sociétés, comment on dit encore dans votre journal, là ? Ah oui, les multinationales ! Et maintenant qu’on est parti, avec ce partenariat qui est bon pour nous, dans le nord, dans le sud, ils vont déverser les saletés de la mine dans le canal de la Havannah. Seigneur, mais le canal, ma sœur, c’est le passage de tous les ancêtres d’ici, là ! Non, mais, tu te rends compte ? Mais où on va, là, avec tout ça ? Tu veux que je te dise ? Eh ben, moi, j’ai rêvé de là, là, avec un pays dans l’eau huileuse, avec des hommes assis et leurs ignames debout dans l’eau ! Et je les voyais de très, très haut, comme d’une haute montagne et des épaules d’un géant ! Et tu vois, ça, c’est vraiment le genre de rêve qui me fout vraiment la trouille, tu vois ! Ah, la, la ! J’en ai encore froid dans le dos, là ! … »


L’autrice néo-calédonienne publie en 2009, toujours aux éditions Madrépores, un deuxième roman, Graines de pin colonnaire. Dans un style que l’on pourrait qualifier de « patchwork » où elle mêle poèmes, fragments de journal et nouvelles, nous découvrons le portrait sans fard des femmes de l’archipel.

« Je m’appelle Tany,

comme ma tante que j’ai eu l’immense privilège

d’accompagner durant sa longue maladie,

jusqu’au bout de sa vraie vie…

Ma tante écrivait au fil des jours,

beaucoup de courts poèmes, de brefs récits

et d’autres petites odes à la vie quotidienne,

sous forme de journal de ce temps-là.

J’avais le privilège de leur première lecture,

comme de la promesse de m’occuper

un jour de leur publication.

Elle les partageait ensuite avec ses amies,

lors de ce qu’elle appelait avec humour

« le divan du psy », « la séance confidences »

ou « l’heure de la confession ».

Au cours de ces réunions,

elles lui livraient, à leur tour, leurs histoires personnelles.

Légères comme une plume, je vous les livre aussi,

avec ses poèmes, son journal et ses nouvelles,

propres à se disperser et à pousser là où elles peuvent,

telles les graines de pin colonnaire.  

Il est toujours question de femmes dans Tâdo, Tâdo, wéé ! Ou « No more baby », éd. Au Vent des Iles, 2012. Du savoir ancestral des femmes qu’elles se transmettent oralement et qui leur permet s’accéder a la liberté. Bien que pragmatique, ce savoir s’approche, bien entendu, de la magie et du merveilleux.

« En plus, dans le conte, elle l'a finalement piégé pour l'enfermer dans la marmite sous laquelle le feu couvait sous la cendre. Maintenant, elle commence à l'allumer pour de bon et pour longtemps.

Ce feu, c'est celui de la parole trop longtemps confisquée et qui lui brûlait les entrailles de femme stérile. »

Dans le roman, ce sont les deux tantes de la protagoniste, Tâdo, qui lui transmettent leur savoir, elles l’entraînent « dans le dédale de la forêt enchantée où elles allaient autrefois cueillir de bon matin les tiges et les feuilles des plantes de guérison ». Puis, elles lui font découvrir « d'une roche plate gravée des signes et des motifs propres aux pétroglyphes ».

Tout ce savoir est lié au secret et au silence. Les femmes ne se le transmettent que dans le cadre le plus intime.

«J'ai vite appris à ne pas pleurer pas me plaindre. J'ai vite appris le silence »

Un dernier recueil de poèmes paraîtra en 2014, A l’orée du sable, publié par

Vents d’ailleurs.

En pays d’Utopia

Banni du réel

en pays d'Utopia

de désirs en illusions

tu promènes tes rêves

des rivages du mythe

au virage des nuages

de la plage des mirages

au visage de la mort

 

Exclu de la terre

en pays d'Utopia

aux rives de l'irréel

des poèmes en délire

tu dérives tes vers

du seuil du virtuel

aux portes du désir

et au plaisir de ta mort

lente et programmée

 

L’air est doux

L’air est doux

au clair du jour

tel l’amour

en appel

au secours

en sa tour

prend garde

à l’affût

de mots taillés

en armes fourbies

en écriture

d’embuscade

en poésie

de combat

à remplir

l’absence

le temps

du souvenir

 

oui

voici venu

le temps

de battre

le rappel

de mémoire

Ceci n’est qu’un aperçu de l’œuvre de Déwé Gorodé qui décède 14 août 2022 dans sa Nouvelle Calédonie. Une écrivaine qui remis à la lumière du jour l’histoire de son peuple et ses souffrances et qui, de ce fait, nous est le plus souvent présentée dans le groupe des auteur·ices « francophones » dont le teint est généralement un peu plus foncé que celui du Français « de souche ». Un racisme à peine voilé qui se pointe même dans les manuels de français langue étrangère !

Des écrivain·es qui, comme Déwé Gorodé, dénoncent la politique encore coloniale de la France, et qui, en outre, apportent à la langue française un nouveau souffle et de nouvelles saveurs.

Reagrupar las imágenes del discurso ahogado

Volver a encontrar la unidad de la palabra desparramada

A los cuatro vientos de la soledad (…)

Recrear la frase ritual que desenmascara la traición

Reinventar la danza mágica que asegura la victoria.” 

Un poco de historia

Nueva Caledonia fue principalmente colonizada por presidiarios entre los cuales los Comunardos que habían escapado de la pena de muerte como Louise Michel.

Una vez terminada su pena, la mayoría no tenía el derecho de volver a la metrópoli, lo que permitió poblar el territorio con colonos de origen europeo. Lo que trajo, por supuesto, une expolición territorial que hizo estallar una revuelta kanak, en 1976, siendo los kanaks los habitantes originarios del archipiélago.

El colonizador francés aisló a los Kanaks e hizo venir, como mano de obra, a nativos de Asia del sudeste.

Esta situación persistió hasta la segunda Guerra Mundial. Después de 1946, el Código del Indigenismo fue abolido y todos los habitantes se volvieron supuestamente franceses por completo.

Se formó, entonces, a comienzos de los años 50, la Unión Caledoniana que gana elección tras elección. Al igual que la OAS, en Argelia, los partidarios de la república colonial, recurrieron a la ilegalidad de los atentados y asesinatos.   

En los años 60, mientras la Polinesia se vuelve el centro de experimentación nuclear de Francia, el gobierno vuelve a la tradición autoritaria en Nueva Caledonia. Los Kanaks vuelven a ser los dejados de lado en su país. En 1985, el 8% entre ellos obtiene el bachillerato.

Ya en los años 60, empero, e inspirándose en las luchas del tercer mundo, los bachilleres kanaks denuncian la marginalización y el racusmi que golpea a su pueblo.  

El gobierno responde instalando en Nueva Caledonia a franceses provenientes de las ex colonias de África del norte.

Los años 80 son, en el archipiélago, el escenario de lo que la hipocresía lingüística francesa llama, como lo hizo en Argelia, de acontecimientos, concretamente una guerra civil que opuso a los kanaks a los partidarios de pertenecer a la república francesa llamados caldoches.

Lps acuerdos de Matignon, firmados el 28 de junio de 1988, ponen fin a las hostilidades, pero los dos firmantes del lado kanak, Jean-Marie Djibaoui y Yéwéné Yéwéné, son asesinados el 4 de mayo de 1989, por un partidario irreductible de la independencia.

En esta tierra conflictiva, nació, en 1949, Déwé Gorodé.

Después de estudios secundarios en su país natal, termina, en 1973,  una licenciatura en letras modernas en la universidad de Montpellier.  Allí descubre también a los autores de la Negritud, lo que desencadena en ella una toma de consciencia tanto artística como política.

La autora es encarcelada en 1973 así como en 1977, a causa de su compromiso con el movimiento independentista kanak.

Esto es lo que escribía Déwé Görödé en sus añ{os en Montpelier::

Noches desnudas

para vos, mi hermana kanak

 

                              Noches desnudas

                              Sombras sin luna

                              Sólo el ciego de por vida

                              vive con tu piel

                              bella

                              mujer que espera

                              en las noches desnudas

 

Sos la iule (1) errante al borde de las fuentes a lo largo de los ríos y riachos

te enrollás en tu cabellera que te cubre entera

Luego al llegar el guerrero que persigue a la chica que huye de la Tribu

te desnudás te descubris te abrís

Y el alma del hijo de la tribu

penetra en tu cabellera y se pierde

El alma del hijo de la tribu el espíritu del guerrero

se han vuelto la choza donde vive la iule errante

 

 Sos la flor deshojada sin cesar por el soplo del arrecife el dios ciclón

Te dejás cortar al azar de las noches interminables

por las manos los dedos que manejan las lanzas las hachas de custodia y los garrotes

te abandonás te marchitás revivís

y tus manos se cansan del tayo (2)

y las armas del tayo descansan en paz

las hachas las lanzas los garrotes se durmieron

y son los tranquilos tótems de tus pétalos inmortales

Sos la lluvia límpida que ronda la alta montaña guardiana de los espíritus tabús

 

 El llamado ansioso del brujo hacedor de lluvia te tienta

Vuelta multitud para él dejás las nubes

en la negra locura de las aguas

Y la danza del brujo te recibe

y las vías rituales esta noche se callan

El río del valle se los ha tragado

y las palabras del brujo se vuelven gotas de lluvia

 

                             Ojos cerrados

                              Lágrimas de alegría

                              Al alba el rocío

                             surge de tus senos

                              fuentes

                              aguas que divagan

                              en tus ojos cerrados

 

(Montpellier, 14 de enero de 1972)

 

(1) iule : suerte de oruga, asimilada a una ninfa de las fuentes y los bosques. Tótem de ciertos clanes, es conocida por extraviar o volver lovos a los paseantes.

(2) tayo : hombre kanak

 

El primer libro de poemas de Déwé Gorodé, Sous les cendres des conques (Bajo las cenizas de las caracolas), comenzado en prisión, aparece  en 1974. Encontramos en él uno de sus textos más conocidos.

Araucaria

Araucaria

pino columnar

que agujerea el cielo de mi país

con su tronco que se estira

hacia los recuerdos inconfesables

de mi pueblo humillado

refugiado en el cielo de las plegarias

 

para olvidar

 

Araucaria

árbol de palabras

de clanes y tribus traicionados

en esta tierra que es la suya

sus palabras detenidas

en la dura resina sólida

les diré en la vara ya que no quiero

 

OLVIDAR

 

Les escribiré

allí donde pueda

lo mejor que pueda

aquí y ahora

 

por más que busque

noche y día

no veo otra cosa en el cielo

para iluminar mi memoria

En 1994, la escritora publica Utê Mûrûnû, petite fleur de cocotier (Utê Mûrûnû, pequeña flor de cocotero), un libro de cuentos que será reeditado veinte años después con dos otros textos, uno de ellos, Utê Mûrûnû 2014, evoca, a través varias generaciones, la condición de las mujeres lanal, tironeadas entre el respeto por su cultura milenaria y el llamado de una sociedad en movimiento.     

”Utê Mûrûnû, ¿pero cuál entre todas nosotras? ¡Buena pregunta! Ya que hoy somos muy numerosas las que llevamos esos dos nombres heredados de nuestras abuelas de las generaciones precedentes. Aquí mismo en nuestra tribu, aún por todo el país, según las redes de parentela que fundan y que regulan la formación social kanak.  En lo que a mi concierne, UM 2014, que tengo veinte años este año, soy esa niñita con la que había soñado su abuela epónima cuando aún estaba en el vientre de mi madre. Estoy absolutamente segura de eso pues, a medida que crecía cerca de ella, en los años de mi primera infancia, ella me repetía sin cesar que yo era el retrato calcado de la niña de su sueño.

En 2005, Déwé Gorodé publica, en la editorial Madrépores, su primera novela, , L’épave (El barco naufragado).

Cerca de Numea, bajo la protección de una vieja lancha dada vuelta en la playa, Tom y Léna van a aprender a amarse...

Al filo de los encuentros, de los recuerdos que se desgranan, y que a veces los roen, intentan en cano desmarañar v la madeja de sus deseos, de los deseos y los miedos que pesan sobre sus jóvenes vidas.

[…] después, cuando el frente decidió la puesta en marcha en la base de las estructuras políticas, económicas y escolares en el comienzo de clases, allí donde se podía, con mi amigo, nos juntamos con otros jóvenes en su tribu en el fondo del valle para animar la EPK, la escuela popular kanak. Auu, hermana, la EPK, esa escuela, ¡la amé! ¡Lo que la amé esa escuela!Esa escuela de ese tiempo. El tiempo de las luchas. Esa escuela que no tenía nada que ver  con la que acababa de abandonar. Esa escuela que me abrió los ojos sobre mi identidad. Sobre de dónde vengo, quién soy y adonde voy. Esa escuela donde aprendí a estar de pie. Y a estar con los otros. ¡La escuela de mis sueños!”

Mirá, voy a decirte, yo, lo único que les interesa a esos buenos señores, es nuestro níquel, punto y aparte. Además, evidentemente, sus comercios, negocios, y todo el circo, ¡eh! Y sobre esto, no hay dudas, son todos iguales, esos tipos, ¡cuando se trata de su plata grande y de otros tráficos grandes! ¡Porque el Guijarro, como le dicen, es jugoso, aún es muy jugoso! ¡Hasta qué punto! ¡Ni siquiera tenemos idea tanto nos sacaron de los lugares de decisión! Sí, siempre es el gran negocio con las enormes ganancias para sus grandes sociedades, ¿Cómo las llaman en su diario? Ah sí, ¡las multinacionales! Y ahora que comenzamos con esta asociación buena para nosotros, en el norte, en el sur, van a volcar las porquerías de la mina en el canal de la Havannah. Señor, pero el canal, hermana, ¡es el paso de todos los antepasados! No, pero, ¿te das cuenta? ¿Dónde vamos con todo esto? ¿Querés que te diga? ¡Soñé con eso, con un país en el agua aceitosa, con hombres sentados y sus boniatos parados en el agua! ¡Y yo los veía desde muy muy arriba, como desde una montaña alta o desde los hombros de un gigante! Y ves, ¡estos son los sueños que realmente me dan miedo! ¡Ah! ¡Todavía me dan escalofríos!...”  


La autora neocaledoniana publica, en 2009, siempre en la editorial Madrépores, una segunda novela.  Graines de pin colonnaire (Semillas de Araucaria columnaris). En un estilo que se podría calificar de “patchwork” en el que mezcla poemas, fragmentos de diario y cuentos, descubrimos el retrato sin maquillaje de las mujeres del archipiélago.

Me llamo Tany,

como mi tía a quien tuve el inmenso privilegio

de acompañar durante su larga enfermedad,

gasta el final de su verdadera vida…

Mi tía escribía a lo largo de los días,

muchos cortos poemas, breves relatos

y otras pequeñas odas a la vida cotidiana,  

bajo la forma de un diario en esos tiempos.

Yo tenía el privilegio de su primera lectura,

como de la promesa de ocuparme  

un día de su publicación.

Ella los compartía luego con sus amigas,

durante lo que llamaban con humor

“el diván del psicólogo” “la sesión confidencias”

o “la hora de la confesión”.

Durante esas reuniones,

ellas le confiaban, a su vez, sus historias personales.

Ligeras como su pluma, se los confío también,

con sus poemas, su diario y sus cuentos,

llevados a dispersarse y a crecer allí donde puedan,

como las semillas de la araucaria  columnaris.” 

En Tâdo, Tâdo, wéé ! Ou « No more baby », éd. Au Vent des Iles, 2012, también se habla de mujeres. Del saber ancestral de las mujeres que se transmiten oralmente y que les permite acceder a la libertad. Aunque pragmático, este saber se acerca, por supuesto, de la magia t de lo maravilloso.

Además, en el cuento, ella finalmente, lo entrampó para encerrarlo en la olla bajo la cual calentaba el fuego bajo la ceniza. Ahora, comienza a encenderlo realmente y por largo tiempo.

Este fuego es el de la palabra confiscada durante demasiado tiempo y que le quemaba las entrañas de mujer estéril.”

En la novela, son las dos tías de la protagonista, Tâdo, quienes le transmiten su saber, “en el dédalo del bosque encantado donde iban otrora a buscar bien de mañana los tallo y las hojas de las plantas de curación.” Luego, le hacen descubrir, “una roca chata grabada con signos y motivos propios de los petroglifos”.

Todo este saber está ligado al secreto y al silencio. Las mujeres sólo se lo transmiten en el ámbito más íntimo.

“Rápidamente aprendí a no llorar a no quejarme. Aprendí rápido el silencio”.

Un último libro de poemas aparecerá en 2014, A l’orée du sable (En el linde de la arena), publicado por  Vents d’ailleurs.

En tierras de Utopía

 

Desterrado de lo real

en tierras de Utopía

de deseos  a ilusiones

paseás tus sueños

de las riberas del mito

al viraje de las nubes

le la playa de los espejismos

al rostro de la muerte

 

Excluido de la tierra

en tierras de Utopía

en las riberas de lo irreal

de los poemas en delirio

derivás tus versos

del umbral de lo virtual

a las puertas del deseo

y al placer de tu muerte  

lenta y programada

 

El aire está tibio

 

El aire está tibio

en el claro del día

como el amor

pidiendo

auxilio

en su torre

tené cuidado

con el acecho

de palabras talladas

como armas bruñidas

en escritura

de emboscada

en poesía

de combate

para llenar

la ausencia

el tiempo

con el recuerdo

 

ha llegado

el tiempo

de golpear

el llamado

de la memoria 

Esto es sólo yn pantallazo de la obra de Déwé Gorodé que muere el 14 de agosto de 2022 en su Nueva Caledonia, Una escritora que volvió a poner a la luz del día la historia de su pueblo y sus sufrimientos, y que por ello, nos es le más a menudo presentada en el gripo de los autor@s “francófonos” cuya tez es generalmente más oscura que la de los franceses de cepa. ¡Un racismo a penas velado que aparece aún en los manuales de francés lengua extranjera!  

Escritor@s que, como Déwé Gorodé, denuncian la política aún colonial de Francia y que, además, traen a la lengua francesa un nuevo soplo y nuevos sabores.

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