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Affichage des articles du octobre, 2021

RENÉ MARAN, LE PRÉCURSEUR - RENÉ MARAN, EL PRECURSOR

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«  On hume les odeurs du village, on en partage les repas, on voit l’homme blanc tel que l’homme noir le voit, et après y avoir vécu, on y trouve la mort. Voilà tout pour cette histoire mais quand on l’a lue, on a vu Batouala, et cela signifie que c’est un grand roman  », Ernest Hemingway dans le Toronto Star, 1922. Il y a tout juste cent ans, en octobre 1921, Batouala , véritable roman nègre , de René Maran , obtenait le prix Goncourt. Abiola Irele, spécialiste de littérature francophone à l’université de Harvard, explique l’importance historique de ce roman : «  Le coup d’envoie de la prose africaine de langue française est lancé en 1921, par le roman Batouala… son portait sensible de la vie africaine, son évocation de l’environnement naturel n’a pas manqué d’exercer une profonde impression sur ses lecteurs africains, offrant un vif exemple de ce que peut offrir de meilleur le roman africain en français.  » Ce qui choque le plus, à l’époque, dans l’ouvrage publié par Albin Michel, c’

Relire Steinbeck - Releer a Steinbeck

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  Certains auteurs du passé, proche ou lointain, peuvent nous éclairer sur cette époque si trouble où nous vivons. C’est le cas de Zola, de Baldwin, de Camus, d’Hugo… C’est le cas de John Steinbeck  et ses Raisins de la colère . Pour preuve, ces extraits tirés d’un de ces chapitres où l’auteur américain s’évade de son histoire et de ses personnages, comme le faisait Hugo dans Les Misérables, pour mettre en lumière les travers de la société qu’ils subissent. «  La Banque ou la Compagnie… a besoin… veut… insiste… exige… comme si la Banque ou la Compagnie étaient des monstres doués de pensée et de sentiment qui les avaient eux-mêmes subjugués. Ceux-là se défendaient de prendre des responsabilités pour les banques ou les compagnies parce qu’ils étaient des hommes et des esclaves, tandis que les banques étaient à la fois des machines et des maîtres. Il y avait des agents qui ressentaient quelque fierté d’être les esclaves de maîtres si froids et si puissants. Les agents assis dans leurs

L’envers du décor – La otra cara

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  Le rire des déesses, Ananda Devi Grasset, 2021 Aujourd’hui, au moment où l’on dévoile, en France, le nombre de 216.000 victimes de la pédocriminalité de l’Église catholique, je viens de finir le roman Le rire des déesses de l’autrice mauricienne d’origine indienne Ananda Devi , dans lequel l’un des thèmes centraux est la mainmise d’un gourou sur une enfant. «  Depuis la terrasse de la Maison, j’ai tout vu. J’ai vu Shivnath emmenant Chinti avec la superbe de celui auquel rien ne saurait être refusé, celui auquel la terre elle-même appartient puisqu’il a l’appui des dieux, celui devant lequel tant de gens se prosternent qu’il prend leur adoration pour son dû. » Ananda Devi dresse ici le portrait exact de ceux qui détiennent le pouvoir, soit pour des raisons économiques ou politiques, soit pour des raisons soi-disant spirituelles, en Inde, dans ce début du XXIe siècle. En Inde aussi bien qu’ailleurs. Le roman commence dans la Ruelle où habitent les prostitués les plus misérabl