L’esclavage en toutes lettres (5) – La esclavitud con todas la letras (5)



 Plus avance le XXe siècle vers sa fin, plus la publication d’œuvres littéraires dont le sujet est l’esclavage augmente, aussi bien dans les Antilles francophones qu’en Amérique latine.


Ti-Jean, le héros, j’emploie ce terme à dessein, du roman, ou dirais-je du conte fantastique, de Simone Schwarz-Bart, Ti-Jean L’Horizon (1979) est appelé dès son plus jeune âge à unir son peuple et à le mener vers un avenir meilleur.

Un beau jour, un monstre, la Bête, dévore le soleil laissant les Antillais dans le noir. Le grand-père de Ti Jean, Wademba, vieux sage qui réside dans l’En-haut, où vivent les descendants des marrons, attachés à la mémoire de la terre-mère, l’Afrique, lui donne comme mission de voyager au continent ancestral dans le ventre de la Bête et puis de la tuer pour rendre la lumière à son peuple.

Notre héros vivra plusieurs années dans un village Ba’Sonanqué, en Afrique mais les relations deviendront de plus en plus tendues, à tel point qu’il sera lapidé par ses hôtes. Il meurt et descend, comme Orphée, dans le royaume des morts.

Si l’on lit entre les lignes, l’on comprend que l’Afrique n’est plus le paradis perdu chéri par la Négritude.

Une scène nous montre la distance qui sépare Ti Jean de ses hôtes africains

« -Quel est ce mot bizarre ? demanda Maïari en portant deux doigts au lobe de son oreille : il n'appartient pas à notre langue, il n'est pas d'ici.

-De quel mot parles-tu ? s'étonna Ti Jean.

-Je parle du mot : "nègre" ...

Ti Jean le considéra longuement, et voyant que l'enfant ne la badinait pas : -Frère, dit-il enfin, mon petit frère de l'autre côté de l'eau, oublie donc mes paroles[...]

-Frère ? répéta l'Africain d'un air incrédule »

Les différences sont grandes, les Africains bien que colonisés par les Européens n’ont pas perdu leurs racines comme les descendants d’esclaves.

Dans son chemin de retour cers les Antilles, Ti Jean échoue dans une ville sans nom qui n’est autre que Paris.

Et là, la dernière étape de son voyage avant son retour dans son île, Ti Jean découvre que l’injustice sociale n’est pas due exclusivement à une différente pigmentation mais aussi à l’accaparement des richesses par un petit nombre de personnes au détriment du reste de la population.

Il rentre finalement dans son pays, tue la Bête, ce qui libère le soleil et redonne toute sa beauté à la nature.

Tu Jean pourra finalement accomplir sa mission, unir son peuple, ce qui signifie réconcilier les gens d’En-haut qui, enfermés dans leur idée d’un passé mythique, se sont maintenus isolés du monde et de ses transformations ; avec les gens d’En-bas, descendants des esclaves restés dans les plantations qui, encore soumis aux Blancs, ne voient aucun avenir pour les Noirs. Ils travaillent pour les Blancs, sur la terre des Blancs, leur existence ne diffère pas trop de celle de leurs aïeuls.

Un roman qui est une quête de l’âme antillaise, de son histoire et de son avenir.

Résultat du viol de sa mère sur le bateau négrier qui l’emmenait vers la Barbade, Tituba naît dans l’ambiance mortifère d’une plantation.

« Quand, de longues semaines plus tard, on arriva au port de Bridgetown, on ne s’aperçut point de l’état de ma mère. Comme elle n’avait sûrement pas plus de seize ans, comme elle était belle avec son teint d’un noir de jais et, sur ses hautes pommettes, le dessin subtil des cicatrices tribales, un riche planteur du nom de Darnell Davis l’acheta très cher. Avec elle, il fit l’acquisition de deux hommes, deux Ashantis ceux-là aussi, victimes des guerres entre Fantis et Ashantis. Il destinait ma mère à sa femme qui ne parvenait pas à se consoler de l’Angleterre et dont l’état physique et mental nécessitait des soins constants. Il pensait que ma mère saurait chanter pour la distraire, danser éventuellement et pratiquer ces tours dont il croyait les nègres friands. Il destinait les deux hommes à sa plantation de canne à sucre qui venait bien et à ses champs de tabac »

Moi, Tituba, sorcière noire de Salem, de Maryse Condé, parut en 1986

Se défendant d’un deuxième viol, la mère de Tituba blesse le maître de la plantation.

« On pendit ma mère.

Tous les esclaves avaient été conviés à son exécution. Quand, la nuque brisée, elle rendit l’âme, un chant de révolte et de colère s’éleva de toutes les poitrines que les chefs d’équipe firent taire à grands coups de nerf de bœuf. Moi, réfugiée entre les jupes d’une femme, je sentis se solidifier en moi comme une lave, un sentiment qui ne devait plus me quitter, mélange de terreur et de deuil.

On pendit ma mère. »

Tituba est chassée de la plantation et trouve refuge chez une guérisseuse, Man Yaya.


« Ce n’était pas une Ashanti comme ma mère et Yao, mais une Nago de la côte, dont on avait créolisé en Man Yaya, le nom de Yetunde. On la craignait. Mais on venait la voir de loin à cause de son pouvoir.

Elle commença par me donner un bain dans lequel flottaient des racines fétides, laissant l’eau ruisseler le long de mes membres. Ensuite elle me fit boire une potion de son cru et me noua autour du cou un collier fait de petites pierres rouges.

— Tu souffriras dans ta vie. Beaucoup. Beaucoup. Ces paroles qui me plongeaient dans la terreur, elle les prononçait avec calme, presque en souriant. »

Ayant été chassée par son maître, Tituba sera libre jusqu’au jour où elle se marie avec John l’Indien, un esclave issu des populations autochtones, propriété de Susanna Endicott, qui deviendra alors sa maîtresse.  Celle-ci les vendra ensuite à Samuel Parris, pasteur de Salem.

Maryse Condé nous raconte alors l’histoire des sorcières de Salem, comme le fit dans sa pièce de théâtre Arthur Miller, mais vue par l’esclave noire, Tituba.

« Bientôt le royaume où la lumière de la vérité brille sans partage. Assise à califourchon sur les bois de ma potence, Man Yaya. Abena, ma mère et Yao m’attendaient pour me prendre la main.

Je fus la dernière à être conduite à la potence. Autour de moi, d’étranges arbres se hérissaient d’étranges fruits. »

Le message du roman de Maryse Condé va bien au-delà de la reconstitution historique, c’est une vraie dénonciation du fanatisme religieux, du racisme, de l’esclavage.

« Le 124 était habité de malveillance. Imprégné de la malédiction d'un bébé.

Les femmes de la maison le savaient, et les enfants aussi. Pendant des années, chacun s'accommoda à sa manière de cette méchanceté ; puis, à partir de 1873, il n'y eut plus que Sethe et sa fille Denver à en être victimes. La grand-mère, Baby Suggs, était morte, et les fils, Howard et Buglar s'étaient enfuis à l'âge de treize ans, l'un, le jour où un simple regard sur un miroir le fit voler en éclats (ce fut le signal pour Buglar) ; l'autre, le jour où l'empreinte de deux petites mains apparut sur le gâteau (cela décida Howard). Aucun des deux garçons n'attendit d'en voir davantage : plus de chaudronnée de pois chiches renversée toute fumante sur le plancher ; plus de biscuits secs écrasés et émiettés en ligne contre la porte. »

Ainsi commence Beloved (1986) de Toni Morrison, prix Novel de littérature 1993.

Tiré de l’histoire vraie, celle d’une mère, esclave, qui tue son enfant pour que celle-ci ne subisse pas ce même sort atroce, le roman ne peut nullement être comparé, comme on a voulu le faire, à un mythe grec, l’autrice ne puise son inspiration que dans la mémoire collective de son peuple.

Le roman, dédié aux soixante millions et davantage, décrit assez longuement les conditions de vie des esclaves, On y découvre la déshumanisation qui existait dans les plantations, déshumanisation qui avait des fondements pseudoscientifiques, soutenus ici par le propriétaire de la plantation Sweet Home, Schoolteacher, c’est-à-dire, le maître d’école. Ces théories seront à la base, non seulement de l’esclavage mais aussi de la colonisation. Elles se retrouvent toujours dans le discours des racistes actuels.

Un jour, Paul D, ancien esclave comme Sethe, arrive au 124. La vie de Sethe change.

« – Sethe, tant que je suis ici avec toi, avec Denver, tu peux aller partout où tu veux. Faire le saut, si tu en as envie, parce que je te rattraperai, petite. Je te rattraperai avant que tu tombes. Va aussi loin au-dedans qu'il te faut aller, je te tiendrai les chevilles. Je m'assurerai que tu ressortes. Je ne dis pas ça parce que j'ai besoin d'un endroit où m'installer. C'est la dernière chose dont j'aie besoin. Je t'ai dit, je suis un homme de la route, mais voilà sept ans que je mets le cap vers ici. Que je marche par tout le pays. Vers le Nord, le Sud, l'Est, l'Ouest ; j'ai été dans des coins qui n'ont même pas de nom sans jamais rester longtemps nulle part. Mais quand je suis arrivé ici et que je me suis assis là, dehors, sur la véranda, à t'attendre, eh bien, j'ai su que ce n'était pas vers l'endroit que je venais : c'était vers toi. Nous pouvons nous faire une vie, ma petite. Une vie.

– Je ne sais pas, je ne sais pas.

– Laisse-moi faire. Vois comment ça marche. Pas de promesses, si tu ne veux pas en faire. Vois juste comment ça va. D'accord ?

– D'accord. »

Et puis, après des années hantées par le fantôme de l’enfant assassinée, l’arrivée d’une très jeune inconnue, Beloved, donne à Sethe l’occasion d’exorciser son passé.

Tout porte à croire que la jeune Beloved est la réincarnation de l’enfant mort

« La femme buvait goulûment à la tasse en étain piqueté, puis la tendait pour en redemander. Quatre fois, Denver la remplit et quatre fois la femme la vida comme si elle venait de traverser un désert. Quand elle fut satisfaite, il demeurait un peu d'eau sur son menton, mais elle ne l'essuya pas. Plutôt, elle enveloppa Sethe d'un regard ensommeillé. Mal nourrie, se dit Sethe, et plus jeune que ses vêtements le laissent croire – jolie dentelle au cou, et chapeau de femme riche. Sa peau était sans défaut, à l'exception de trois griffures verticales sur le front, si fines et légères qu'on les eût à première vue prises pour des cheveux, des petits cheveux en avant-garde de la masse noire et filée qui s'épanouissait et se lovait sous son chapeau.

– Vous êtes de par ici ? lui demanda Sethe.

La femme signifia que non en secouant la tête et se pencha en avant pour ôter ses chaussures. Elle retroussa sa robe jusqu'aux genoux et roula ses bas. Quand ils furent fourrés dans ses chaussures, Sethe vit que ses pieds étaient comme ses mains, doux et tendres. Elle s'est probablement fait charger à bord d'un chariot, se dit Sethe. Sûrement une de ces filles de la Virginie de l'Ouest en quête d'un sort plus enviable qu'une vie de tabac et de sorgho. Sethe se pencha pour ramasser les chaussures.

– On peut savoir votre nom ? demanda Paul D.

– Beloved, répondit-elle. Beloved.

Et sa voix était si basse et si rauque qu'ils s'entre-regardèrent. Ils entendirent la voix d'abord, le nom ensuite.

– Beloved. Vous avez un nom de famille, Beloved ? lui demanda Paul D.

– De famille ? »

Ce personnage si poétique de Beloved est, pourrait-on dire, le vestige des anciennes croyances africaines qui subsistent chez les esclaves, malgré le lavage de cerveau chrétien qu’ils subissent. Des croyances qui affirment que les morts ne meurent jamais vraiment et ont toujours un rôle à jouer auprès des vivants.

Cette poésie est présente dans tout le texte, y compris pour nommer le plus dur, comme c’est le cas du prunelier inscrit sur le dos de Sethe, les marques indélébiles qu’elle reçut en tant qu’esclave.

Ce contexte d’une violence extrême est présenté par Toni Morrison dans un récit polyphonique, une narration morcelée qui passe d’un narrateur à un autre et d’une époque à une autre, peut-être la seule façon de témoigner sur cette période atroce de l’histoire.

 

La esclavitud con todas las letras (5)


Cuanto más avanza el siglo XX hacia su final, más aumenta la publicación  de obras literarias cuyo tema es la esclavitud, tanto en las Antillas francoparlantes como en América Latina.  

Ti-Jean, el héroe, empleo el término adrede, de la novela, o diría del cuento fantástico, de Simone Schwarz-Bart, Ti-Jean L’Horizon (1979) es llamado desde temprana edad a unir a su pueblo y a llevarlo a un porvenir mejor.

Un buen día, un monstruo, la Bestia, devora el sol dejando a las Antillas en la oscuridad. El abuelo de Ti Jean, Wademba, viejo sabio que vive en El Arriba, donde viven los descendientes de cimarrones, atados a la memoria de la Tierra Madre, el África, le da como misión la de viajar al continente ancestral en el vientre de la Bestia y de matarla luego para devolver la luz a su pueblo.

Nuestro héroe vivirá varios años en un poblado Ba’Sonanqué, en África, pero las relaciones se tensarán cada vez más, a punto tal que será lapidado por sus anfitriones. Muere y desciende, como Orfeo, al reino de los muertos.  

Si se lee entre líneas se entiende que África ya no es el paraíso perdido amado por la Negritud.

Una escena nos muestra la distancia que separa a Ti Jean de sus anfitriones africanos.  

«- ¿Cuál es esa palabra extraña? Preguntó Maiari llevando dos dedos al lóbulo de su oreja: no pertenece a nuestra lengua, no es de aquí.

- ¿De qué palabra me hablás? Se asombró Ti Jean.

- Hablo de la palabra «negro» …

Ti Jean lo observó largo tiempo, y viendo que el niño no bromeaba: Hermano, dijo por fin, mi hermanito del otro lado del agua, olvidá mis palabras (…)

- ¿Hermano? repitió el africano con gesto incrédulo.»

Las diferencias son grandes, los africanos, aunque colonizados por los europeos, no han perdido sus raíces como los descendientes de esclavos.

En su viaje de vuelta a las Antillas, Ti Jean se encuentra en una ciudad sin nombre que no es otra que París.

Y allí, en la última etapa de su viaje antes de volver a su isla, Ti Jean descubre que la injusticia social no se debe exclusivamente a una diferencia de pigmentación, pero también al acaparamiento de las riquezas por un pequeño número de personas en detrimento del resto de la población.

Vuelve finalmente a su país, mata a la Bestia, lo que libera al sol y vuelve a dar toda su belleza a la naturaleza.

Tu Jean podrá finalmente cumplir con su misión, unir a su pueblo, lo que significa reconciliar a la gente de El Arriba que, encerrados en un pasado mítico, se mantuvieron aislados del mundo y de sus transformaciones, con la gente de El Abajo, descendientes de los esclavos que permanecieron en las plantaciones, quienes, aún sometidos a los blancos, no ven ningún porvenir para los negros. Trabajan para los blancos, en las tierras de los blancos, su existencia no difiere demasiado de la de sus antepasados.

Una novela que es una búsqueda del alma antillana, de su historia y de su porvenir

Consecuencia de la violación de su madre en un barco negrero que la llevaba a Barbados, Tituba nace en el ambiente mortífero de una plantación

«Cuando, largas semanas más tarde, llegaron al puerto   de Bridgetown, no descubrieron el estado de mi madre. Como no tenía seguramente más de 16 años, como era bella con su tez de azabache, y con el dibujo sutil de las cicatrices tribales sobre sus altos pómulos, un rico colono llamado Darnell Davis la compró muy caro.   Con ella, compró dos hombres, dos ashantis también, víctimas de las guerras entre fantis y ashantis. Destinaba a mi madre a su mujer que no lograba consolarse de haber dejado Inglaterra y cuyo estado físico y mental necesitaba cuidados constantes. Pensaba que mi madre sabría cantar para distraerla, bailar eventualmente y practicar esis trucos que creía que gustaban a los negros Destinaba a lis dos hombres a su plantación de caña de azúcar que funcionaba bien y a sus campos de tabaco.»

Yo, Tituba, bruja negra de Salem, de Maryse Condé, apareció en 1986

Al defenderse de una segunda violación, la madre de Tituba hiere al dueño de la plantación.

«Colgaron a mi madre.  

Todos los esclavos habían sido convidados a su ejecución. Cuando expiró con la nuca quebrada, un canto de revuelta y de cólera se elevó de todos los pechos acallado a latigazos por los jefes de equipo. Yo, refugiada entre las faldas de una mujer, sentí que se solidificaba en mí, como una lava, un sentimiento de terror y de duelo que ya no me debía abandonar. 

Colgaron a mi madre.»

Tituba es echada de la plantación y se refugia en casa de una curandera, Man Yaya.

«No era un ashanti como mi madre y Yao, pero una nago de la costa, cuyo nombre de Yetunde había sido acriollado como Man Yaya. La temían,  pero venían a verla desde lejos a causa de su poder.  

Comenzó dándome un baño en el que flotaban raíces fétidas, dejando chorrear el agua a lo largo de mis miembros. Luego me hizo beber una poción creada por ella y anudó alrededor de mi cuello un collar de piedritas rojas.  

—Sufrirás en tu vida. Mucho. Mucho. Pronunciaba esas palabras que me hundían en el terror con calma, casi sonriendo.»

Por haber sido echada por su amo, Tituba será libre hasta el día en que se case con John el Indio, un esclavo proveniente de las poblaciones autóctonas, propiedad de Susanna Endicott, quien será a partir de entonces su ama. Esta la venderá luego a Samuel Parris, pastor en Salem.  

Maryse Condé nos cuenta entonces la historia de las brujas de Salem, como lo hizo Arthur Miller en su obra de teatro, pero vista por la esclava negra, Tituba.

«Pronto el reino donde la luz de la verdad brilla sin excepción.  Sentada en cuclillas en la madera de mi horca, Man Yaya. Abena, mi madre, u Yao, me esperaban para tomarme de la mano.

Fui la última en ser llevada a la horca. A mi alrededor, extraños árboles se erizaban con extraños frutos.» 

El mensaje de la novela de Maryse Condé va mucho más allá de la recontrucción histórica, es una verdadera denuncia del fanatismo religioso, del racismo, de la esclavitud.

«El 214 estaba habitado por la malevolencia. Impregnado por la maldición de un bebé.  

Las mujeres de la casa lo sabían, y los niños también. Durante años cada cual se las arregló a su manera con esta maldad; luego, a partir de 1873, sólo Sethe y su hija Denver fueron sus víctimas. La abuela, Baby Suggs, había muerto y los hijos, Howard et Buglar habían huido a la edad de trece años, uno el día en que una simple mirada hizo volar un espejo en pedazos (fue la señal para Burglar); el otro el día en que la marca de dos manitos apareció sobre la torta (esto decidió a Howard). Ninguno de los dos varones esperó ver demasiado: no más cacerola de porotos volcada humeante sobre el puso; no más galletas secas aplastadas y desmigajadas contra la puerta.»

Así comienza Beloved (1986) de Toni Morrison, premio Novel de literatur 1993.

Inspirada en una historia verdadera, la de una madre esclava que mató a su hija para que no sufriera su misma suerte atroz, la novela no puede ser comparada de ninguna manera, como han querido hacerlo, con un mito griego, la autora sólo se inspira en la memoria colectiva de su pueblo.

La novela, dedicada a los sesenta millones y más, describe bastante extensamente las condiciones de vida de los esclavos. Descubrimos la deshumanización que existía en las plantaciones

, deshumanización que tenía fundamentos seudocientíficos, defendidos aquí por el propietario de la plantación Sweet Home, Schoolteacher, es decir, el maestro de escuela. Estas teorías serán la base no sólo de la esclavitud sino también de la colonización. Se encuentran en los discursos de los racistas actuales.

Un día, Paul D, que fue esclavo como Sethe, llega al 124. La vida de Sethe cambia.

« – Sethe, mientras esté aquí contigo, con Denver, podés ir donde quieras. Pegar el salto, si te fan las ganas, porque te agarraré, chiquita, te agarraré antes de que te caigas. Andá tan lejos como debas ir, te agarraré los tobillos. Me aseguraré de que salgas. No lo digo porque necesite un lugar donde quedarme. Es lo último que necesito. Te lo dije, soy un hombre de la ruta, pero hace siete años que me dirijo hacia aquí. Que camino por todo el país. Hacia el norte, el sur, el este, el oeste estuve en lugares que ni siquiera tienen nombre, sin querer quedarme mucho tiempo en ningún lado. Pero cuando llegué aquí y que me senté allí, afuera, en la galería, para esperarte, y bien, supe que no iba hacia el lugar, sino hacia vos. Podemos hacernos una vida, chiquita. Una vida.

-No sé, no sé.

-Dejame hacer. Mirá cómo funciona. Sin promesas si no querés hacerlas. Mirá simplemente como anda. ¿De acuerdo?

-De acuerdo.»

Luego, después de años atormentados por el fantasma de la niña asesinada, la llegada de una joven desconocida, Beloved, da a Sethe la oportunidad de exorcizar su pasado.

Todo lleva a creer que la joven Beloved es la reencarnación de la niña muerta.

«La mujer bebía golosamente de la taza de metal, luego la tendía para pedir más. Denver la llenó cuatro veces y la mujer la vació cuatro veces como si hubiera atravesado un desierto. Cuando se sintió satisfecha, había un poco de agua sobre su mentón, pero no la secó. Envolvió, más bien, a Sethe con una mirada adormecida. Mal alimentada, se dijo Sethe, y más joven que lo que sus ropas podrían hacerlo creer    -lindo encaje en el cuello y sombrero de mujer rica. Su piel era sin defectos, excepto tres arañazos verticales en la frente, tan finos y livianos que se los podría haber tomado, a primera vista, por cabellos a la vanguardia de la masa negra y filamentosa que prosperaba y se ubicaba bajo su sombrero.

– ¿Es de por acá? Le prefuntó Sethe.

La mujer dijo que no sacudiendo la cabeza y se inclinó hacia adelanta para sacarse los zapatos. Levantó si vestido hasta las rodillas y enrolló sus medias. Cuando las hubo puestas en sus zapatos, Sethe vio que sus pies eran como sus manos, suaves y tiernos. Probablemente se hizo llevar por un carro, se dijo Sethe. Seguramente una de esas chicas de Virginia del Oeste en busca de una suerte mejor que una vida de tabaco y sorgo. Sethe se inclinó para levantar los zapatos.   

–¿Se puede saber su nombre? Preguntó Paul D.

– Beloved, respondió ella. Beloved.

La coz era tan baja y tan ronca que se miraron entre ellos. Oyeron primero la voz y luego el nombre.

– Beloved. ¿Tiene un apellido, Beloved? le preguntó Paul D.

– ¿Apellido?»

Este personaje tan poético, Beloved, es, podría decirse, el vestigio de antiguas creencias africanas, que subsisten entre los esclavos, a pesar del lavado de cerebro cristiano que sufren. Creencias que afitman que los muertos no muren nunca realmente y que siempre tienen un papel junto a los vivos.  

Esta poesía está presente en todo el texto, aún para nombrar lo más duro, como es el caso del endrino inscripto en la espalda de Sethe, las marcas imborrables que recibió como esclava.

Este contexto de una extrema violencia es presentado por Toni Morrison en con un relato polifónico, una narración despedazada que pasa de un narrador a otro y de una época a otra, quizás la única manera de testimoniar sobre este período atroz de la historia.

 

 

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