FICHE DE LECTURE Le réalisme merveilleux au Mozambique – El realismo mágico en Mozambique

 L’accordeur de silences, Mia Couto, Paris, Métailié

Le réalisme merveilleux, produit littéraire éminemment latino-américain, a fait souche en Afrique.

Le Mozambicain Mia Couto, qui reconnaît ce qu’il doit à Juan Rulfo et à Gabriel García Márquez, a publié chez Métailié un beau roman au titre très poétique, L’accordeur de silences.

Il s’agit du surnom de Mwanito, 11 ans, l’enfant narrateur.

«Je suis né pour me taire. Le silence est mon unique vocation. C’est mon père qui m’a expliqué : j’ai un don pour ne pas parler, un talent pour épurer les silences», nous explique-t-il.

Bien que le titre choisi pour la traduction française d’Elizabeth Monteiro Rodrigues ait eu l’accord de l’auteur et s’accorde, c’est le cas de le dire, parfaitement au roman, son titre original est Jesusalém, un mot valise qui signifie « Jésus et au-delà », c’est le nom donné par le père du narrateur, Silvestre Vitalicio,  à la réserve de chasse abandonnée où il s’installe avec ses deux garçons, Mwanito et son frère ainé Ntunzi, le militaire, devenu serviteur, Zacaria Kalash, au temps de la guerre civile qui ravagea le pays, et après la mort de sa femme Dordalma (Douleur de l’âme).

On voit ici l’importance des noms dont sont baptisés les personnages. Il vaudrait mieux dire rebaptisés :

« En réalité, Silvestre Vitalício avait déjà porté un autre nom. Il s’était jadis appelé Ventura. Quand nous déménageâmes à Jésusalem, mon père nous attribua d’autres noms. Rebaptisés, nous avions une autre naissance. Et nous étions davantage dispensés de passé. »

L’au-delà, c’est la guerre, les peuplades en fuite. Jesusalem est un non lieu, un lieu situé en dehors des réalités du monde.

« – À partir de maintenant, il n’y a plus de où, décréta Silvestre.

Dans cette odyssée, nous avons croisé des milliers de personnes qui avançaient en sens inverse : désertant la campagne pour la ville, fuyant la campagne en guerre pour se réfugier dans la misère urbaine. »

Ce monde clos, exclusivement masculin, géré par les décisions, très souvent incohérentes, et parfois burlesques, de Silvestre, se voit chamboulé avec l’apparition d’une femme, une Blanche, une Portugaise, Marta. Devant elle, Mwanito, 11 ans, qui n’a aucun souvenir du visage de sa mère décédée dans des circonstances troubles, éclate en sanglots.

C’est justement la présence de Marta qui va faire basculer l’histoire de cette communauté si particulière. L’autorité de Silvestre se délite et ils finissent tous par réintégrer la maison familiale en ville.

C’est là que Mwanito découvre la véritable histoire de sa mère, par l’intermédiaire de Marta :

« Ses mots étaient étranger, même dits dans la même langue. La langue de Marta avait une autre race, un autre sexe, un autre velours. Le simple fait de l’écouter était pour moi une façon d’émigrer de Jésusalem. »

Magnifique, et poétique, définition de tous les visages différents que peut adopter une langue, tout comme est magnifique et  pétrie de poésie, la prose de Mia Couto qui nous fait le portait de son pays par le biais  d’un récit de silence et de mots, d’enfermement et de délivrance.

El realismo mágico, producto literario eminentemente latinoamericano, se ha trasplantado en África.

El mozambiqueño Mia Couto, que reconoce lo que les debe a Juan Rulfo y a Gabriel García Márquez, ha publicado en Métailié una bella novela con el título poético de L’accordeur de silences (El afinador der silencios).

Se trata del apodo de Mwanito, 11 ans, el niño narrador.

Nací para callarme. El silencio es mi única vocación. Mi padre me lo explicó: tengo un don para no hablar, un talento para purificar los silencios”, nos explica.

Aunque el título elegido para la traducción francesa de Elizabeth Monteiro Rodrigues haya tenido el acuerdo del autor y concuerde perfectamente con la novela, su título original es Jesusalém, una palabra compuesta que significa “Jesús y más allá”, el nombre dado por el padre del narrador, Silvestre Vitalicio, a la reserva de caza abandonada donde se instala con sus dos hijos, Mwanito y su hermano mayor Ntunzi, el militar vuelto servidor, Zacaria Kalash, en tiempos de la guerra civil que devastó el país, y después de la muerte de su mujer Dordalma (Dolor del alma).

Se ve aquí la importancia de los nombres con que son bautizados los personajes. Más valdría decir vueltos a bautizar:  

« En realidad, Silvestre Vitalicio ya había llevado otro nombre. Se había llamado otrora Ventura. Cuando nos mudamos a Jesusalem, mi padré nos atribuyó otros nombres. Vueltos a bautizar teníamos otros nacimientos. Estábamos dispensados del pasado en mayor medida»

El más allá es la guerra, las poblaciones que huyen. Jesusalem es un no lugar, un lugar ubicado fuera de las realidades del mundo.

« – A partir de ahora, ya no hay dónde, decretó Silvestre.

En esta odisea habíamos cruzado millares de personas que avanzaban en sentido inverso, huyendo el campo en guerra para refugiarse en la miseria urbana. »

Este mundo cerrado, exclusivamente masculino, ordenado por las decisiones muy a menudo incoherente, y a veces burlescas, de Silvestre, se ve trastornado con la aparición de una mujer, una blanca, una portuguesa, Marta. Ante ella, Mwanito, 11 años, que no tiene ningún recuerdo del rostro de su madre fallecida en circunstancias turbias, se pone a llorar.  

Es justamente la presencia de Marta la que va a hacer cambiar la historia de esta comunidad tan particular. La autoridad de Silvestre se desintegra y terminan todos por volver a la casa familiar en la ciudad.

Allí descubre Mwanito la verdadera historia de su madre, por intermedio de Marta:

« Sus palabras eran extranjeras, aún dichas en la misma lengua. La lengua de Marta tenía otra raza, otro sexo, otro terciopelo. El solo hecho de escucharla era para mí una manera de emigrar de Jesusalem. »

Magnífica y poética, definición de todos los rostros diversos que puede adoptar una lengua,l como así es de magnífica y llena de poesía, la prosa de Mia Couto que nos hace el retrato de su país por medio de un relato de silencio y de palabras, de encierro y de liberación.

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