Merci Alain !

 

Salut Alain ! Hommage à Alain Rey, Le Robert, 2021

J’ai lu quelque part que Salut Alain ! serait un excellent cadeau de Noël. Ma fille me l’ayant offert, je certifie. Un excellent cadeau pour ceux qui aiment la langue française, une langue française plurielle et ouverte au monde comme celle que défendait Alain Rey.

Cet ouvrage, publié par Le Robert, est précisément un hommage au grand lexicographe Alain Rey, décédé le 28 octobre 2020, et son titre est celui de sa dernière chronique sur France Inter, émise en juin 2006, chronique qui se trouve au début du volume.

« Quel vocable choisir lorsque le mot de la fin est vraiment final ?

Adieu me paraît décourageant. En outre, pour ceux qui ne croient pas au ciel, la formule serait soit hypocrite, soit fictive. Au revoir n’est pas pertinent à la radio, et au réentendre ne se dit pas. Dommage. Reste salut, et saluez ! (…) »

On pourrait presque dire que tout Alain Rey se trouve dans ce texte, son érudition, son amour des mots et, bien entendu, son sens de l’humour.


Si nous tournons les pages de Salut Alain !,  nous trouverons d’autres de ces chroniques, des entretiens ainsi que des textes spécialement rédigés par ses collaborateurs, par des enseignants, des artistes, éblouis les uns et les autres par l’érudit qui supervisa durant soixante-dix ans les dictionnaires des éditions Le Robert.

Ces textes, signés par l’historienne Mona Ozouf, la philosophe et philologue Barbara Cassin, les linguistes Claude Hagège, Louis-Jean Calvet et Laélia Véron, les écrivains Erik Orsenna, Dany Laferrière et Eric Fottorino, les chanteurs Dick Annegarn, Magyd Cherfi et Pierre Perret, et j’en passe, montrent combien l’œuvre d’Alain Rey éclaira la société ainsi que la culture françaises. Ce même Alain Rey qui rencontra, en 2017, le youtubeur Squeezie et les rappeurs Bigflo et Oli pour composer le « freestyle du dico » !

Ce qui nous montre  que chez lui, l’érudition  et la recherche  n’avaient rien d’empesé.


C’est, d’ailleurs, ce que l’on découvre tout au long de l’ouvrage, principalement au fil des entretiens, comme, par exemple, ‘’Tous les mots sont permis’’, paru le 11 octobre 2005 dans Télérama.

« (..,)toutes les sociétés ont besoin de s’appuyer sur une vision du monde incarnée par une langue. (…) nos dictionnaires n’ont pas admis le moindre québécisme, belgicisme, helvétisme (je n’évoque même pas l’Afrique !) avant les années 1970. Le français ne pouvait être pluriel. C’était jugé intolérable. »

Ou bien…

« La langue française n’est, si j’ose dire, ni pure ni soumise. Les faux défenseurs de sa pureté ne font qu’entraver son élan. (…) Les puristes, même bien intentionnés, ont peur de la créativité de la langue q1u’ils prétendent sauver malgré elle. Ce sont les mêmes qui ont attaqué avec violence Rabelais. Pour Montaigne, au contraire, la pureté c’est la pauvreté », exprimait-il dans l’interview ‘’Français, mille ans de bravitude’’ publiée par Le Nouvel Observateur du 7 septembre 2009.

Le grand lexicologue expliquait, enfin, aux journalistes de La Croix, en novembre 2010, à l’occasion de la réédition du Dictionnaire historique de la langue française :

« La langue française appartient à tous ceux qui l’emploient. Français de France, Acadiens, Québécois, Africains qui la nourrissent de contenus culturels différents. C’est ce qui fait sa richesse. »

Je conclurai par une citation de Victor Hugo, mise en exergue dans Salut Alain !:

« Car le mot, qu’on le sache,

est un être vivant. »

Ce qu’Alain Rey n’eut de cesse de nous prouver.

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